L’Union européenne ne fait rien pour réduire sa dépendance au gaz russe ! Vraiment ?

Dans le contexte des tensions entre la Russie et l’Ukraine, la question de la dépendance énergétique de l’Union européenne revient au cœur des préoccupations des Européens. En cette période de forte demande, Gazprom est en train de limiter ses livraisons de gaz à l’Europe. Alors que la reprise économique s’est intensifiée en Europe dans les derniers mois de 2021, les livraisons de gaz en provenance de la Russie étaient de 25% inférieures à celles de la fin de 2020, ce qui pousse l’UE à se préparer à un scenario où les livraisons en provenance de Russie venaient à baisser davantage. Sur fond de flambée des prix de l’énergie, l’Union européenne prend des actions fortes pour limiter la dépendance des États membres au gaz russe et diversifier ses sources d’approvisionnement énergétique.

L’approvisionnement en gaz de l’Europe

L’Europe importe 90% de son gaz. La Russie est historiquement le premier fournisseur de gaz naturel à l’Union européenne et, actuellement, plus de 40% du gaz en Europe est acheminé depuis la Russie. Viennent ensuite la Norvège, l’Algérie, le Qatar et les États-Unis. Il existe deux façons d’acheminer du gaz : le transporter sous pression dans des gazoducs ou condensé à l’état liquide par la mer (GNL). Au troisième trimestre de 2021, 77 % des importations de gaz européen transitaient par les gazoducs, les 23% restantes était fournies sous forme de gaz naturel liquéfié transporté par bateau. C’est notamment grâce à ce second mode d’acheminement que l’UE est en mesure d’importer du gaz des Etats-Unis, du Qatar ou de l’Algérie.

Alors que la Russie reste le fournisseur majoritaire de l’Union européenne en gaz naturel, la dépendance énergétique est variable selon les pays : des pays comme l’Allemagne et la Pologne, ou encore l’Autriche, la Lituanie, la Slovaquie et la Hongrie dépendent presque entièrement du gaz russe, alors que d’autres comme l’Estonie ou la Suède enregistrent les taux de dépendance gazière les plus bas.

Ces dernières années, la Russie a déjà interrompu ses livraisons de gaz à l’Ukraine et transitant par l’Ukraine, ce qui avait affecté l’approvisionnement de quinze Etats membres de l’UE en 2009. 

L’UE travaille depuis plusieurs années à la diversification des sources d’approvisionnement en gaz

Depuis, l’UE a pris de mesures fortes pour garantir un approvisionnement énergétique sûr aux Européens, en diversifiant les voies d’approvisionnement. Cela comprend l’identification et la construction de nouvelles routes qui réduisent la dépendance des pays de l’UE vis-à-vis d’un fournisseur unique de gaz naturel et le développement massif des infrastructures pouvant accueillir du GNL. Ainsi, avec l’aide de l’UE, d’ici fin 2022, tous les États membres devraient avoir accès à au moins trois sources de gaz, y compris l’accès direct ou indirect au marché mondial du GNL. 

Plusieurs voies d’approvisionnement supplémentaire ont déjà été développées :

Le corridor gazier Sud, une double diversification

Ce corridor gazier achemine du gaz vers l’UE depuis le bassin caspien, l’Asie centrale, le Moyen-Orient et le bassin méditerranéen oriental. Il apporte une double diversification : une diversification des sources, avec du gaz azéri dans un premier temps et une diversification des routes de transit, à travers la Turquie. 

Pleinement opérationnel depuis 2021, il a permis d’acheminer 10,5 milliards de mètres cubes de gaz azéri vers l’Italie, la Géorgie, la Grèce et la Bulgarie, soit environ 2% de la demande gazière européenne. Ce corridor a été partiellement financé par l’Union européenne. 

Le hub méditerranéen

La création d’un hub méditerranéen dans le Sud de l’Europe permet de valoriser les ressources et le potentiel de l’Algérie, ainsi que de nouvelles ressources gazières dans la Méditerranée d’Est, pour assurer la diversification des sources et des voies d’approvisionnement en gaz naturel. Plusieurs projets visent à développer l’acheminement du gaz en provenance de l’Israël, de l’Egypte et du Chypre, que ce soit par de gazoducs ou à travers du GNL : l’UE contribue au financement de deux projets d’infrastructure, le gazoduc “Cyprus East Med” et le terminal GNL “CyprusGas2EU”. Ce dernier sera opérationnel dès 2023. 

Des gazoducs financés par l’UE

L’Europe a investi dans 115 gazoducs et interconnecteurs depuis 2014. Des gazoducs importants qui ont bénéficié du soutien financier de l’UE, comme le Baltic Pipe (l’interconnexion gazière entre le Danemark et la Pologne), le GIPL (liant la Pologne et la Lituanie) et le gazoduc Grèce-Bulgarie seront mis en service en 2022 et permettront de mettre fin à l’isolement gazier dans les pays baltes et dans certains pays en Europe centrale et orientale. 

Un recours accru au GNL  

Depuis la crise gazière de 2009, la Commission européenne s’est engagée à développer le recours au gaz naturel liquéfié (GNL), un combustible facile à transporter et à stocker, pour réduire la dépendance énergétique et assurer la sécurité de l’approvisionnement. La Commission européenne a présenté en février 2016 une stratégie européenne pour le GNL et le stockage du gaz. Il en résulte que toutes les régions d’Europe continentale ont une connexion directe ou indirecte à un terminal de GNL. Actuellement, il y a plus de 20 terminaux GNL en Europe, dont 4 en France. Les terminaux GNL de Chypre et d’Alexandroúpolis en Grèce sont en cours de développement et devraient être mis en service en 2023.

Une accélération de la diversification de l’approvisionnement gazier en 2022

L’UE est entrée dans l’hiver 2021-2022 avec des réserves de gaz anormalement basses. En cette période de réduction des livraisons de gaz russe sur un fond de flambée de prix de l’énergie, la Commission européenne a examiné tous les scénarios de rupture possibles, au cas où la Russie déciderait d’interrompre partiellement ou complètement l’approvisionnement en gaz de l’UE. La situation actuelle a poussé l’UE à accélérer sa diversification des sources d’approvisionnement en gaz, une énergie de transition dont le poids restera important dans les années à venir.

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